La musique đŸŽ”oui la musiqueđŸŽ¶

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Dans DEMOS, il y a Dispositif d’Education Musicale et Orchestrale ; jusque lĂ  le sigle Ă©voque la musique, l’art, les instruments de toutes sortes, on s’attendrait presque Ă  entendre les cuivres, les cordes frottĂ©es, Ă  guetter l’arrivĂ©e du chef d’orchestre et sa baguette presque magique.

Mais il y a aussi le S dans DEMOS. S pour  social. Un S qui Ă©voque les citĂ©s, les banlieues, la pauvretĂ© intellectuelle, culturelle, un S qui jure avec cet enseignement. Un S que l’on a rattachĂ© Ă  un sigle s'adressant d’ordinaire Ă  une caste privilĂ©giĂ©e.

Mais ce soir avec ou sans S le concert qui a lieu dans ce lieu encore plus prestigieux que la Philarmonie de Paris est unique. Les petits musiciens du projet DEMOS ont Ă©tĂ© conviĂ©s Ă  jouer dans les  écuries du chĂąteau de Versailles. Ils ont rĂ©pĂ©tĂ© toute l’aprĂšs-midi avant d’arriver par autocar dans ce lieu encore ceint de l’empreinte du roi soleil, Louis XIV, un roi qui aimait les arts et la musique, un roi qui a rayonnĂ© durant son rĂšgne.

Les parents eux aussi ont fait la queue sans mot dire, impressionnĂ©s. Dans cette queue, une femme, brune, se fraye un chemin entre les boubous africains et les toilettes endimanchĂ©es. Elle s’appelle Dalila. Elle a reconnu la maĂźtresse de son fils qui joue du violoncelle dans l’orchestre. Elle aime bien cette maĂźtresse qui avait poussĂ© et encouragĂ© sa classe Ă  postuler Ă  DÉMOS et qui est venue les Ă©couter jouer. Cinq d’entre eux ont d’ailleurs Ă©tĂ© retenus. La "classe DÉMOS " l’avait on surnommĂ©e.

Dalila passera la soirĂ©e prĂšs de la maĂźtresse de son fils Ă  partager son enthousiasme pour ce beau projet. Elle, le S elle s’en moque, elle est pour l’ascenseur social, elle y croit, elle l’utilise d’ailleurs pour tirer ses enfants vers le haut. Elle rĂȘve d’école privĂ©e pour eux, en pensant que leur Ă©ducation n’en sera que meilleure. Elle rejette la « miseducation » de beaucoup sans les citer. Son discours est Ă  l’image de son Ă©nergie et de son enthousiasme. Voir son petit garçon aux boucles brunes, toujours dans la lune, se concentrer sur son instrument au milieu de ce magnifique orchestre menĂ© par une chef de renom, lui met des Ă©toiles dans les yeux. Elle est heureuse Dalila, elle est heureuse d’ĂȘtre dans cet endroit magnifique, dans cet endroit qui lui donne l’impression que tout est possible finalement. Elle profitera du spectacle en s’imprĂ©gnant de la moindre note de musique et applaudira Ă  tout rompre Ă  la fin des trois morceaux jouĂ©s. Son cĂŽtĂ© battra la chamade Ă  la vue de son petit homme qui salue gravement et solennellement le public. Il lui semble qu’il scrute les gradins pour l’apercevoir alors elle lui fait un grand signe de la main. Si ce n’était pas le lieu, elle l’appellerait.

Elle a rĂȘvĂ© ce soir Dalila, peut-ĂȘtre plus que son fils, elle a Ă©tĂ© fiĂšre, elle a rĂ©alisĂ© que la musique et la culture ouvrent des portes vers un monde diffĂ©rent, avec ou sans S.

A la mémoire de Dalila.

Juin 2017

Sam Kamat.